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JOURNAL OFFICIEL - PARTIE NON OFFICIELLE 9
Dimanche 9 avril 1871
CRÉATION D'UNE COMMISSION DES BARRICADES (p537)
Une commission des barricades, présidée par le commandant de place et composée des capitaines du génie, de deux membres de la Commune et d’un membre élu par chaque arrondissement, est instituée à partir du 9 avril, à une heure.
Paris, le 8 avril 1871, le délégué à la guerre, E. Cluseret.
DÉSORGANISATION VOLONTAIRE DE LA GARDE NATIONALE (p538)
Depuis quelques jours, il règne une grande confusion dans certains arrondissements ; on dirait que des gens payés par Versailles prennent à tâche :
1° de fatiguer la garde nationale ;
2° de la désorganiser.
On fait battre la générale pendant la nuit.
On bat le rappel à tort et à travers. En sorte que personne ne sachant plus auquel entendre, on ne se dérange même plus, et cette puissante institution, cette armée, espoir et salut du peuple, est à la veille de sombrer sous son triomphe.
Un tel état de choses ne saurait subsister plus longtemps. En conséquence, j’invite tous les bons citoyens à se pénétrer des instructions suivantes :
La générale ne sera battue que sur mon ordre ou celui de la commission exécutive, et dans le cas seul de prise d’armes générale.
Le rappel ne sera battu, dans les arrondissements que par ordre de la place, et pour la réunion d’un certain nombre de bataillons commandés pour un service spécial.
Ce n’est pas tout : malgré mes ordres formels, une canonnade incessante diminue nos provisions, fatigue la population, irrite les esprits et amène d’un côté la fatigue, de l’autre la colère et la passion.
En sorte que cette Révolution si grande, si belle et si pacifique, pourrait devenir violente, c’est-à-dire faible.
Nous sommes forts ; restons calmes !
Cet état de choses est dû en parties à des chefs militaires trop jeunes et surtout faibles pour résister à la pression populaire. L’homme du devoir ne connaît que sa conscience et méprise la popularité. Je réitère l’ordre d’avoir à se tenir sur la plus stricte défensive, et à ne pas jouer le jeu de nos adversaires, en gaspillant et nos munitions et nos forces, et surtout la vie de ces grands citoyens, enfants du peuple, qui ont fait la Révolution actuelle.
Quand le bruit aura cessé, que le calme de la rue aura passé dans les esprits, nous serons beaucoup plus aptes à perfectionner notre organisation, d’où dépend notre avenir.
Paris, le 8 avril 1871, le délégué à la guerre, E. Cluseret
HOMMAGE À MARGUERITE GAINDER (p541)
Aux citoyens membres de la Commune de Paris.
Citoyens,
Les citoyens soussignés, appartenant au 66e bataillon de la garde nationale de Paris déclarent que Marguerite Gainder, épouse Lachaise, cantinière audit bataillon, demeurant rue Sedaine, 65, a, dans le combat du 3 courant, en avant de Meudon, tenu une conduite au-dessus de tout éloge et de la plus grande virilité en restant toute la journée sur le champ de bataille, malgré la moisson que faisait autour d’elle la mitraille, occupée à soigner et panser les nombreux blessés, en l’absence de tout service chirurgical.
En foi de quoi, citoyens membres de la Commune, nous venons appeler votre attention sur ces actes, afin qu’il soit rendu justice au courage et au désintéressement de cette citoyenne, républicaine des plus accomplies.
Salut et fraternité.
AUTORITÉ MILITAIRE (p543)
Mairie du Ve arrondissement
Plusieurs bataillons éloignés de Paris peuvent ignorer encore le décret de la Commune qui concentre dans une seule main l’autorité militaire.
Quelques délégués des bataillons ont pu intervenir dans les opérations de guerre en voie d’exécution. Il importe de leur répéter que leurs attributions ne leur donnent pas ce droit, dont l’exercice aurait, au point de vue de la discipline, les plus fâcheux résultats.
C’est aux seuls ordres du ministère de la guerre ou de la place Vendôme, qui est son émanation, que les bataillons doivent désormais obéir.
D. M. Régère.
EXÉCUTION DES OFFICIERS AYANT REFUSÉ DE TIRER SUR LE PEUPLE (p545)
L’affiche suivante a été posée hier sur les murs de Paris :
L’infanterie de ligne à la population de Paris.
Citoyens,
Un conseil de guerre siégeant à Versailles vient de condamner à la peine de mort les officiers et sous-officiers de l’armée qui ont refusé de faire feu sur le peuple.
Aux habitants de Paris de nous juger, et si nous sommes coupables, nos poitrines sont là pour répondre. Nous ne tomberons pas en lâches.
Le capitaine d’infanterie délégué
A. Pierre. Bonaventure, caporal, Philipot, Sergent.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES - SOUTIEN ANGLAIS À L'EXPOSITION UNIVERSELLE (p547)
La commission royale de l’exposition universelle de 1871 s’est réunie hier à Marlborough House, sous la présidence du prince de galles, à l’effet d’aviser aux démarches qu’il y aurait à faire pour arriver à obtenir le concours de la France dans la prochaine exposition internationale, si toutefois la chose était possible dans les conjonctures actuelles.
Le prince de Galles annonce que l’objet de la réunion est d’inviter les possesseurs d’œuvres d’art à présenter pour aider la commission française à compléter la section qui lui a été réservée à cette exposition par un prêt temporaire d’ouvrages de peinture et de sculpture, de meubles de salon et autres pièces importantes de travaux d’art appliqués à l’industrie. Le prince fait observer que dans les tristes circonstances où la récente guerre avait placé la France, cette demande pour obtenir le concours individuel devenait nécessaire. Les prêts que l’on arriverait à obtenir ainsi ne seraient que pour peu de temps, et seraient utilisées en attendant que les commissaires de France, aient le temps d’en faire venir d’autres directement de leur pays. Mais au cas où les difficultés actuelles continueraient d’exister pour la durée tout entière de l’exposition.
M. du Sommerard, commissaire général, au nom de la France, auprès de l’exposition internationale de 1871, fait observer que bien que les principaux artistes et manufacturiers de Paris fussent prêts et bien disposés à contribuer à l’exposition, il était toutefois peu probable qu’en raison des obstacles qui s’opposaient, quant à présent, à la transmission des colis de Paris, il pût en arriver un assez grand nombre pour être placés assez à temps et figurer à l’ouverture de l’exposition. Il croit donc que dans de semblables conjonctures, il valait mieux faire appel aux prêts individuels.
Tous les français qui se trouvaient présents à la réunion ont fait offre de service, en proposant les tableaux et autres objet d’art qu’ils ont en leur possession, en se chargeant en même temps d’inviter leurs amis à en faire autant et à concourir, par tous les moyens en leur pouvoir, à la réalisation du plan formé par la commission de Londres.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES - CESSION DU LUXEMBOURG À LA PRUSSE (p548)
Grand-Duché de Luxembourg
La nouvelle de la cession du Luxembourg à la Prusse prend chaque jour plus de consistance. Nouvelle preuve du peu de respect des grandes puissances militaires du continent pour les engagements solennelles et pour le droit des gens, et que l’on méprise profondément les droits et l’opinion de l’Angleterre.
L’affaire a été conduite secrètement entre deux ou au moins trois gouvernements, sans tenir compte des vues du reste. Il paraît probable que l’on s’était assuré d’avance de l’acquiescement de la Russie. Il paraîtrait que l’arrangement aurait été communiqué aux gouvernements de l’Angleterre et de l’Autriche qui auraient aussi donné leur assentiment sans se préoccuper des vœux de leurs populations.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES – SOUTIEN DE L'AMIRAUTÉ ANGLAISE AU PAPE (p549)
Le vice-amiral Yelverton a rendu visite au pape, qui a été d’une extrême affabilité ; il a été enchanté de la visite du vice-amiral, et surtout de son assurance que l’escadre anglaise de la Méditerranée sera toujours à la disposition de Sa Sainteté en cas d’éventualités.
Il est assez curieux de voir un gouvernement protestant mettre ses escadres au service d’un pape catholique.
PROTESTATION DE M. DUPONT DE BUSSAC
M. Dupont de Bussac a adressé à la Patrie la lettre suivante :
À M. le rédacteur en chef de la Patrie
Monsieur,
Vous avez publié, d’après le journal la Vérité, le projet d’une singulière combinaison ministérielle, où M. Thiers et les députés bien pensants de Paris auraient mêlé mon nom à ceux d’hommes politiques avec lesquels j’ai toujours été et suis plus que jamais en hostilité.
Je proteste contre un rapprochement que je regarde comme une mauvaise plaisanterie et presque comme un outrage à tout mon passé.
Agréez mes civilités.
DUPONT (de Bussac), ancien représentant du peuple en 1848-51, proscrit de décembre.